Des femmes qui s’aiment – Evelyne Le Garrec
La réprobation publique les enfermait naguère dans le placard du silence et de la clandestinité. Aujourd’hui, des lesbiennes sont interviewées à visage découvert par la télévision et descendent dans la rue pour la désormais traditionnelle manifestation des homosexuels. Certaines font bénir leur union, d’autres revendiquent pour leur couple le statut de concubinage. Les lesbiennes, dit-on, sont sorties du « placard ». Mais au-delà des slogans et des apparences, derrière la nouvelle tolérance affichée par la société, qu’en est-il de la réalité quotidienne des « femmes qui s’aiment » ? De Paris, de province, de Berlin, elles ont été nombreuses à accepter d’en témoigner ici. Expériences plurielles, souvent contradictoires, d’où se dégage non le portrait-robot de « la » lesbienne 1984, mais un kaléidoscope de visages de femmes, riches précisément de leur pluralité et de leurs contradictions. A toutes cependant, ou presque, est commune la lutte douloureuse, parfois longue, qu’elles ont dû mener – et d’abord contre elles-mêmes – pour que puissent émerger la conscience et l’acceptation de leur véritable désir sexuel. Car, si la loi ne réprime plus l’homosexualité, l’hétérosexualité garde force de loi et reste le modèle unique et contraignant. Dès lors, peut-on parler de liberté de choix ? Ce que disent les lesbiennes pose à toutes les femmes la question de leur droit à l’autodétermination sexuelle et de la « révolution culturelle » qui, seule, rendrait possible l’exercice de ce droit.